Synopsis et Extraits de la pièce



Le début de la pièce :

 

Puisqu’on ne sait pas ce qui va arriver demain…

 

Un train.

 

Alfredo arrive avec son téléphone portable et ses lunettes de soleil. Il ressemble à une star de cinéma et se comporte comme telle. Il parle en néerlandais. Il s’arrête devant un siège libre, à côté de Rosa qui essaie de dormir contre la vitre.

 

ALFREDO, à Rosa à voix basse : Je peux m’asseoir à côté de vous ?

Elle fait la tête, sort son sac du siège.

Il termine sa conversation et lui tend la main.

ALFREDO : Bonjour.

Elle ne répond pas.

ALFREDO, plus fort : Bonjour. Je suis Alfredo. Je suis belge.

ROSA : Alfredo c’est un nom belge ?

ALFREDO : Et vous ?

ROSA : Rosa.

ALFREDO : Ah, sei italiana !

ROSA : Non.

ALFREDO : Española ?

ROSA : De rouen.

ALFREDO : Ah. Connais pas.

Elle hausse les épaules.

ALFREDO : Je suis belge !

ROSA : Oui, vous l’avez déjà dit.

Elle repose sa tête contre son siège et ferme les yeux.

ALFREDO : Vous faites quoi dans la vie ?

ROSA : Je dors.

ALFREDO : Non je veux dire dans la vie.

ROSA : C’était ironique.

ALFREDO : Ah, humour français, je comprends pas toujours !

ROSA : C’est pas grave.

ALFREDO : Je suis belge mais je ne parle pas français. Je suis du côté flamand. Vers Brugge.

ROSA, en l’imitant : Ah. Connais pas. Je suis française.

ALFREDO : Vous vous moquez de moi, là ?

ROSA : Pas du tout.

ALFREDO : Ah bon. Je comprends pas trop votre humour ici en France.

ROSA : C’est vrai l’humour belge c’est vachement mieux.

ALFREDO : Vous êtes agressive là ?

ROSA : Vous croyez ?

ALFREDO : Ok, c’est bon, je ne vous parle plus.

ROSA : Allélluia !

Il est choqué. Elle referme les yeux et essaie de dormir. Il reprend son tél et parle fort exprès.

ALFREDO : Allo ? Julia ? C’est Alfredo ! Oui, Alfredo le plus beau ! Ca va ma puce ? Oui, très bien. Mais bien sûr que je passe te chercher ! Tu sais bien qu’avec toi c’est : où tu veux ! Quand tu veux ! Ouais. Dis-moi… Tu peux me dire à quelle heure est le debriefing lundi ? Le debriefing lundi ? Oh, mais avec toi ce sera forcément bien. Et tu sais quoi ? Mets ton petit tailleur blanc il te va à ravir ! Mais oui. Moi aussi. D’accord ma belle, à plus tard. Ciao bella ciao !

A Rosa : Vous êtes malade ?

ROSA, agacée : Non.

ALFREDO : Ah bon.

ROSA : Pourquoi ? J’ai une sale tête c’est ça ?

ALFREDO : Non pas du tout vous êtes très jolie, mais vous dormez, vous êtes agressive… ou alors vous êtes enceinte.

ROSA : Ca aussi c’est censé être un compliment ?

ALFREDO : Comment vous faites pour parler avec les gens ?

ROSA : Je ne parle pas avec gens.

ALFREDO : Je comprends pourquoi.

ROSA : On se connait ? Non. Alors gardez vos réflexions pour vous.

ALFREDO : Y’a combien d’heures de route jusqu’à Lille ?

ROSA : 12.

ALFREDO : Eh ben ça va être joyeux.

ROSA : Vous n’avez qu’à changer de place. Ca m’arrange.

ALFREDO : Je crois que tout est complet. Sauf à côté de la vieille dame qui pue là bas. Je préfère encore rester là.

ROSA : Merci, trop aimable.

ALFREDO : Mais je vais essayer de parler à quelqu’un d’autre puisque je vous dérange.

Il se tourne vers des passagers fictifs. Bonjour ! Ah non, allemand je ne parle pas. Bonjour ! Lè, lè non, arabe non plus… Mais c’est la tour de Babel ce TGV !

ROSA : Wow, référence biblique !

ALFREDO : On peut être beau ET cultivé !

ROSA : On peut être orgueilleux ET vantard !

ALFREDO : On se connait ? Non. Alors gardez vos réflexions pour vous. A une autre passager : Vous avez vu comment je l’ai mouchée ?! Non, nothing. Niente. Lè, nine… Oh, la, la, ça va être galère ce voyage…

 

Elle descend le rideau pour cacher le soleil. Il le relève (2 fois).

 

ROSA : J’ai sommeil.

ALFREDO : Il fait beau, j’aime le soleil.

ROSA : Ben il est partout le soleil, vous n’avez qu’à regarder ailleurs !

ALFREDO : J’ai pas envie d’être dans le noir alors qu’il fait un temps magnifique dehors !

ROSA : Vous n’êtes pas dans le noir, y’a des fenêtres partout.

ALFREDO : Vous êtes un vampire ou quoi ?

ROSA : J’ai pas envie d’avoir le soleil dans la tronche pendant que je dors !

ALFREDO : Bon, ok, on le mets là. Au milieu. Ca va ? On fait moit-moit.

ROSA : « On fait moit moit » non mais comment vous parlez ?

ALFREDO : Vous êtes jalouse parce que je parle 3 langues couramment, y compris le langage familier !

 

Elle baisse le rideau, il le relève.

 

ALFREDO : J’ai une séance photo à Lille à 10h demain matin, je dois avoir bonne mine. J’aimerais bien bronzer un peu.

ROSA : Oui ben c’est pas un solarium, c’est un TGV.

ALFREDO : Tiens ils devraient installer des cabines UV dans les TGV. Ben oui, on attend, là, on n’a rien à faire, autant utiliser le temps de manière utile.

ROSA : La prochaine fois vous partirez en jet privé.

ALFREDO : C’est pas parce que je suis mannequin que je suis riche.

ROSA : Ah vous êtes mannequin, excusez-moi !

ALFREDO : Vous êtes coincée.